Je sais qu'il s'en est écoulé, du temps, depuis mon dernier post sur ce blog…Mais j'ai décidé de ne pas laisser mourir ce blog ! Avec de nouveaux textes, quand je serai inspiré :)
Dans deux jours, soit le 14 Novembre, je célèbre le deuxième anniversaire de mon
arrivée sur la base Alfred Faure avec mes camarades de la mission Cro50. Deux
ans jour pour jour après que le Marion Dufresne ait tapé ce haut fond près de
Pointe Basse… Déjà deux ans…
On me pose souvent la question : Quand est-ce qu'on en
revient? Je pense que la durée du retour dépend de chacun, du degré et de la
profondeur de l'expérience d'hivernage, et, évidemment, la place que l'on donne
à cette expérience dans notre retour. Pour ma part, je pense qu'on ne revient
jamais totalement. Des rêves, des voix, une odeur dans le vent humide, une
impression sur la peau, une bourrasque froide qui me surprend, me renvoient
toujours là bas. A la façon dont FitzChevalerie entend toujours la voix de son loup disparu, il me reste des traces de Crozet. Mais ce n'est plus une obsession, ce n'est plus ce chant entêtant
qui occupait toutes mes pensées, non, maintenant c'est un murmure, un chuchotement
à mon oreille, c'est un souvenir, qui a pris cette forme après le départ pour
un nouveau voyage, un autre projet. Mon hivernage n'a pas disparu, mon
expérience est toujours là. Mais la différence avec le temps où j'étais là bas,
c'est qu'à l'époque, il était mon essence même, mon ancrage fondamental qui me définissait. Qu'est-ce que tu fais? Je suis Ecobio en hivernage à Crozet. Voilà, qui suffisait à me définir. Aujourd'hui, il est un élément, fondamental, certes, mais parmi
d'autres, de ce qui fait que je suis moi.
Voilà, s'il y avait un conseil que je donnerais pour ne pas
trop trainer ses basques dans cette mélancolie du retour, c'est de repartir,
ailleurs, dans une situation totalement différente, ou en tout cas de
s'investir dans un autre projet. Mais je pense aussi qu'il est bon
de goûter un peu à cette mélancolie. Après tout, on met fin à une histoire
incroyable qui a duré un an, ce serait triste, voire même décevant, si on
pouvait tourner la page si facilement ! Certains vous diront qu'ils l'ont vécu
ainsi, que ça ne leur a fait ni chaud ni froid de quitter leur île australe. Je
souris en écrivant ces mots parce que ce n'est pour moi pas envisageable, en
tout cas pas avec ma propre expérience. Il y a quelque chose d'inachevé, une
incompréhension ou une déception chez celui qui peut quitter ces lieux sans se
retourner.
Au final, pour moi, accueillir cette tristesse, cette
mélancolie, comme une expression physique de la fin de mon expérience d'hivernage
était, finalement, presque rassurant, une sorte de masochisme rassurant me permettant de m'ancrer dans cette réalité que fut mon hivernage. Mon corps gagné par le spleen était alors en
adéquation avec mes pensées.
Pour marquer le coup, j'ai fait ce petit montage, en grande
partie avec des vidéos que je n'ai pas utilisé à l'époque, un "shot de
Crozet" à consommer vite, pour ressentir l'écho de l'ivresse que c'était
d'être là bas. Est-ce que ça me manque? Oui. Est-ce que ce manque fait mal?
Définitivement, non.
Joyeux 2ème Croziversaire, Cro 50, Bon vent !